Passionnée et engagée, elle insuffle à Caron un souffle nouveau entre tradition et projets audacieux.
Esprit curieux, Olivia de Rothschild s’est toujours sentie plus attirée par la réalité de la vie active que par les théories académiques. Elle aurait pourtant pu choisir une vie de privilèges et de soirées mondaines, mais à seulement 22 ans, avec une maturité rare pour son âge, elle a pris en main le rôle de directrice artistique de la Maison Caron. Enrichie par ses voyages et ses rencontres artistiques, elle mêle l’héritage familial à une vision audacieuse et responsable. Ancrée dans des valeurs de préservation du patrimoine et d’engagement, elle œuvre avec passion pour faire rayonner Caron à travers des projets porteurs de sens et d’innovation.
ELLE Suisse: Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager si jeune dans un rôle aussi important?
Olivia de Rothschild: Un fort sens du devoir envers mon héritage familial, ainsi qu’un besoin de contribuer là où d’autres choisissent parfois de ne pas s’impliquer. J’étais aussi très curieuse et, pour être honnête, l’école finissait par m’ennuyer.
Votre mère, Ariane de Rothschild, a racheté Caron en 2018. Comment collaborez-vous avec elle pour préserver l’héritage de la Maison tout en intégrant votre vision créative?
Ma mère et moi avons choisi de préserver l’héritage de Caron tout en y ajoutant une vision moderne. Travailler ensemble, avec une frontière floue entre vie personnelle et professionnelle, nourrit une démarche sincère et transparente. Nous nous appuyons sur les valeurs fondatrices de Caron, notamment son avant-gardisme et son identité unique. Nous célébrons l’histoire de la Maison sans jamais tomber dans la nostalgie, mais en créant des parfums qui vont au-delà de simples compositions olfactives, fidèles à l’expérience émotionnelle et humaine de Caron depuis 1904. Nous souhaitons développer la marque sur des marchés internationaux comme le Royaume-Uni et les États-Unis.
Quels sont vos objectifs personnels et professionnels pour l’avenir?
En parallèle de Caron, je lance ce mois-ci ma start-up, Oli’s Lab. Elle se concentre sur l’analyse des formulations cosmétiques, leur notation, la revente de produits formulés de manière responsable, et la transparence des actifs dans l’industrie. Mon objectif est de rendre le secteur cosmétique plus transparent et plus éthique. Informer les consommateurs me paraît indispensable, afin qu’ils puissent faire des choix éclairés.
Quelles valeurs vous ont été transmises par votre famille en matière de travail, de responsabilités et de valeurs personnelles?
L’engagement, le sens des responsabilités et l’intégrité. La persévérance et le respect des autres sont des valeurs clés chez nous, qui influencent mes choix, autant professionnels que personnels. J’ai eu beaucoup de chance dans ma vie grâce à l’environnement dans lequel j’ai grandi, les opportunités que ma famille m’a offertes et les écoles que j’ai pu fréquenter. C’est maintenant à mon tour d’honorer et de prolonger cet héritage, notamment à travers mon engagement pour l’OPEJ, une fondation historique qui accompagne et soutient les enfants en difficulté ou privés de famille, en leur offrant un cadre protecteur et éducatif.
En tant que benjamine d’une fratrie de quatre sœurs, comment définiriez-vous votre rôle et votre place au sein de la famille?
Nous avons toutes des places très différentes et complémentaires, une richesse qui influence nos choix respectifs. En grandissant, j’ai souvent cherché à être incluse lorsqu’elles étaient entourées de leurs amies, ce qui m’a rendue adaptable. Nous avons des personnalités affirmées et une grande détermination, héritées de nos parents. Cette dynamique familiale m’a permis de développer une vraie force de caractère.
Voyager a-t-il joué un rôle dans votre vie?
Voyager a une place importante dans ma vie. Cela me permet d’être moi-même, détachée de mon nom, un exercice introspectif et libérateur. Le Mozambique, où je vais depuis l’enfance, est pour moi un retour à la nature brute et authentique. Ce pays m’offre une échappée vers quelque chose de profond et sincère. Le Kirghizistan, que j’ai découvert récemment, m’a aussi beaucoup marquée. Ses paysages, sa culture et l’énergie unique de cet endroit m’ont touchée d’une manière qui m’accompagne toujours aujourd’hui.
Votre nom suscite-t-il des réactions particulières et cela influence-t-il vos relations ou votre manière de faire confiance aux autres?
L’aura de ma famille suscite toujours la curiosité et parfois des attentes spécifiques. Cela peut parfois influencer mes relations et ma manière de les aborder.
Y a-t-il une figure féminine qui vous inspire particulièrement? Qu’admirez-vous en elle?
Pourquoi se limiter aux femmes? Ce qui compte pour moi, c’est l’inspiration, peu importe le genre. Par exemple, Erik Spiekermann m’inspire pour son approche critique et visionnaire de la typographie, notamment de l’Helvetica. Parmi les femmes, Élisabeth Vigée Le Brun, artiste peintre française, est une grande source d’inspiration pour moi, pour sa capacité à capturer la lumière et l’intensité dans les regards.
Vous partagez votre vie entre Paris et la Suisse. Comment vivez-vous cette dualité?
La Suisse est mon «home sweet home», un lieu calme, proche de ma famille, où je me sens enracinée. Paris est aussi essentiel pour moi, une ville stimulante et enrichissante, surtout à mon âge.
Est-ce qu’une phrase ou une devise vous guide dans les moments de doute?
«Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage». Jean de La Fontaine.