De l’aide sociale quand il était enfant à l’entrepreneuriat, Jonathan Anguelov a vécu une impressionnante ascension. Il a réussi un parcours que personne ne pensait possible. À force de travail, d’acharnement et de persévérance, cet incroyable self-made man a accompli son rêve : créer une entreprise dans la tech, Aircall, valorisée aujourd’hui plus d’un milliard de dollars.

ELLE Suisse: Vous venez de sortir un livre Rien à perdre (2025), pourquoi cette envie d’écrire?
Jonathan Anguelov: J’ai eu envie de partager mon histoire et de montrer que rien n’est impossible. On peut tous y arriver. Il faut trouver sa voie, se donner les moyens, se surpasser et croire en ses idées.

Vous avez vécu une enfance difficile, quels sont les moments qui vous ont marqué?
Je suis né de père inconnu. Ma mère n’a jamais su qui était mon père car elle a fait un déni de grossesse de 8 mois. Elle m’a donc élevé seule mais a été très courageuse. Elle a quitté son pays, la Bulgarie, à l’âge de 18 ans et s’est débrouillée pour m’offrir une vie agréable. Elle dirigeait une agence de mannequins à Paris et on habitait dans le 15è arrondissement. Mon quotidien était plutôt tranquille jusqu’au moment où elle a rencontré un homme qui s’est avéré être un escroc. Il débarquait chez moi avec son chauffeur, il semblait être une personne fréquentable mais la réalité était toute autre. En fait, il proposait à ses connaissances d’investir dans l’art et c’est ce qu’a fait ma mère. Sauf que comme les autres victimes, elle a tout perdu. Puis les galères se sont enchaînées. Sa mère est décédée et notre appartement a brûlé. À cette période, elle a sombré dans l’alcool et la dépression. Un matin, des huissiers ont débarqué à la maison, accompagnés de la police afin de tout saisir et je me suis retrouvé placé en famille d’accueil. J’avais 12 ans.

Suite à [la mort de ma mère], je travaillais encore plus qu’avant. Je me suis retrouvé seul, sans famille. Ma seule famille était Aircall et j’y ai donc consacré ma vie.

Jonathan Anguelov
ELLE Suisse

Comment avez-vous vécu cette descente aux enfers?
Même si ces épreuves ont été très dures, je suis fondamentalement un optimiste. Je suis de nature joyeuse et j’essaye toujours de positiver et jamais de m’alarmer. Clairement cette mentalité m’a aidé. Je me suis dit que j’allais tout faire pour m’en sortir. J’avais comme objectif de passer mon bac et de rentrer à l’université.

Qu’est ce qui a été le plus dur à surmonter?
Voir ma mère dans un sale état, se détruire. Et puis aussi la plupart de mes copains m’ont tourné le dos. J’allais dans une école privée et je ne faisais plus partie de leur monde. Du jour au lendemain, ils ne m’ont plus parlé.

Pendant vos études, vous cherchiez déjà à gagner de l’argent?
Tout à fait, j’ai su très tôt que je voulais créer une entreprise, mais j’ai commencé par me dire qu’il fallait que je réunisse un peu de fonds. Depuis toujours, je me suis intéressé à l’immobilier. Avec l’argent récolté en faisant des petits boulots dès l’âge de 14 ans, j’ai acheté à 19 ans une première chambre de service de 8m2 dans le 10e arrondissement à Paris, que j’ai retapée et louée. Puis je me suis débrouillé pour en acheter d’autres. J’avais les loyers qui tombaient chaque mois et je dépensais le strict minimum. J’économisais tout.

En 2021, c’est la consécration, Aircall est devenue la seizième licorne française, valant plus d’un milliard de dollars.

Jonathan Anguelov
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Pourquoi avez-vous investi dans l’immobilier?
Ma grande peur était de finir SDF et je me suis toujours dit que pour éviter ce problème, il fallait que j’aie un toit. J’ai toujours été convaincu que la pierre était une valeur sûre.

Comment avez-vous atterri dans la tech?
J’ai eu mon premier ordinateur à 10 ans et j’ai passé beaucoup de temps devant mon écran. J’ai tout de suite été passionné et je fais partie de ces fous de la tech qui cherchaient les raisons quand il y avait des bugs et qui en essayait de les reproduire pour aider les développeurs à les résoudre. J’étais à fond! A 27 ans, quand j’ai rencontré mon associé Olivier Pailhes, on a créé la société Aircall avec deux autres développeurs qui sont devenus nos associés.

Aircall, société de technologie spécialisée dans la téléphonie d’entreprise, a-t-elle cartonné tout de suite?
Oui et non, les clients ont immédiatement vu l’intérêt du produit, qui était pour l’époque révolutionnaire. On a changé la manière de téléphoner dans les boîtes, mais au début, on a galéré avec des soucis techniques qu’on n’arrivait pas à résoudre. On s’est tout de même accrochés et on a réussi à maintenir une belle croissance qui nous a permis de lever des fonds. Fin 2018, on a réglé tous les problèmes techniques qu’on avait accumulés. Puis, on a vécu une ascension fulgurante. En 2021, c’est la consécration, Aircall est devenue la seizième licorne française, valant plus d’un milliard de dollars.

Plus c’est difficile, plus j’ai envie de me dépasser.

Jonathan Anguelov
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Quels étaient vos rapports avec votre mère à cette période?
Très compliqués, car ma mère buvait et avait plongé dans tous les excès. En 2018, elle a eu un AVC qui l’a achevé en quelques semaines jusqu’à son décès le 31 décembre 2018. Suite à cela, pour ne pas y penser, je travaillais encore plus qu’avant. Je me suis retrouvé seul, sans famille. Ma seule famille était Aircall et j’y ai donc consacré ma vie.

Rien ne vous arrête?
Non, au contraire, plus c’est difficile, plus j’ai envie de me dépasser et d’aller plus loin. En 2018, en parallèle d’Aircall, avec mon associé Gaétan Chebrou, on est devenus propriétaires de notre premier hôtel dans le quartier de Barbès à Paris et aujourd’hui, on a six hôtels 4 étoiles dans la capitale. On a également un métier d’investisseurs, où nous achetons, rénovons et revendons des biens prêts à l’emploi. D’ailleurs, avec notre société spécialisée en investissement immobilier, Aguesseau Capital, on propose aux particuliers et professionnels d’investir à nos côtés en ayant les mêmes rendements que nous.

En étant propriétaire de six hôtels, vous voulez créer un groupe hôtelier?
Oui c’est l’un de mes objectifs. Mais on a tellement d’idées avec mon associé. Je suis également business angel dans plus de 40 startups et je reste actionnaire d’Aircall après mon départ en 2024. C’est une boîte exceptionnelle qui fait à ce jour près de 200 millions de chiffre d’affaires, avec une belle croissance de 30% par an, 700 employés dans le monde et je sais qu’elle va continuer de croître à un rythme soutenu.

Quels sont vos loisirs?
J’adore le sport et j’en ai besoin pour me vider la tête. J’aime courir, faire de la musculation, skier. Très souvent, l’hiver je vais à Verbier. J’aime beaucoup les voitures aussi. J’adore piloter et je me rends de temps en temps sur des circuits me faire plaisir au volant de voitures de sport. Mais ce qui me rend heureux par-dessus tout est d’être avec mes amis. Toute l’année, j’attends l’été pour me retrouver entre copains. En général, on loue une villa et on partage des moments incroyables. C’est ça que j’apprécie le plus!

Comment vous imaginez-vous dans dix ans?
En train de bosser encore et toujours plus! Ma seule et unique passion, c’est mon job. Je ne m’arrête jamais.

Quel est le trait de caractère qui vous caractérise le plus?
Je suis une personne qui dit les vérités. Je suis parfois un peu trop cru d’ailleurs. Cela vient certainement de ma mère, d’origine bulgare. Dans les pays de l’est, il n’y a pas de pincettes, on dit les choses comme elles sont. Mais je ne veux jamais faire de mal. C’est dans un sens positif que je le fais, toujours pour avancer et s’améliorer.

Quelle est votre devise dans la vie?
Le futur nous appartient, c’est à nous de l’écrire.

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