Rencontre avec la professeure Bouchardy

11 novembre 2021 · Modifié · Anne-Marie Philippe

La professeure Christine Bouchardy, une figure, une personnalité, une battante qui ne lâche rien! Redoutable. Et en plein «Octobre rose», mois international du cancer du sein, elle redouble de combativité. 

Elle se bat pour nous les femmes. Malgré ses nombreuses activités, dont on ne citera que quelques-unes: professeure ordinaire à la Faculté de médecine de l’Université de Genève, elle mettra sur pied le Programme genevois de dépistage du cancer du sein et a contribué à la création de l’Institut national d’épidémiologie du cancer en Suisse dont elle a été la vice-présidente. Mais c’est aussi une femme amoureuse, une mère aimante qui n’a pas été épargnée par la vie, mais dont la force de volonté est incroyable et exemplaire.

ELLE SUISSE. POURQUOI EST-CE SI IMPORTANT POUR VOUS «OCTOBRE ROSE»?

CHRISTINE BOUCHARDY. Très important pour moi et les concernées! Le cancer du sein est le cancer numéro 1 en Suisse, principalement en Romandie qui a pendant plusieurs années détenu le triste record d’avoir une des fréquences la plus élevée du monde. Il faut secouer les politiques pour qu’ils s’engagent dans ce combat.

ELLE SUISSE. ET POURQUOI CE TRISTE RECORD?

C.B. Plusieurs facteurs: les femmes ont des enfants plus tardivement et renoncent à l’allaitement, une alimentation calorique, la consommation d’alcool, un manque d’activité physique, le tabagisme. Les femmes ont eu aussi accès aux hormones (la prise de pilule s’est répandue massivement depuis le grand mouvement de la liberté sexuelle) et les hormones de substitution lors de la ménopause. Elles doivent cependant connaître les bénéfices et les risques et faire leur choix en toute connaissance de cause. Les gynécologues doivent en informer les femmes. Moi-même, j’ai fait le choix conscient d’en prendre.                                                                                                                                                               

ELLE SUISSE. QUELLE EST VOTRE PLUS GRANDE SATISFACTION OU GRAND BONHEUR AUJOURD’HUI?

C.B. Aujourd’hui à 64 ans, je peux me permettre d’être contente des combats menés, que ce soit pour le dépistage et le registre national de surveillance de cette maladie. L’expertise basée sur l’expérience du patient est essentielle. Grâce à leur expertise basée sur leur vécu, on va enfin pour la première fois traiter le cancer du sein dans sa globalité humaine et sociale et centrer nos actions sur leurs priorités. Grâce à elles, on a pu les mettre en avant. On devrait avoir une prise en charge gratuite du cancer du sein. Que les pharmas et les assurances mettent la main à la poche pour ne pas laisser ces malades dans une précarité sociale effrayante! C’est inacceptable.

ELLE SUISSE. VOTRE PLUS BELLE RENCONTRE, CELLE QUI A INFLUENCÉ VOTRE VIE.

C.B. Une patiente! Une femme hors du commun. Survivante après un cancer du sein elle a su, avec d’autres femmes, changer ma vision de la maladie. L’expertise des femmes atteintes est un trésor d’informations, qui doit devenir le fondement de tous nos combats.

ELLE SUISSE. QUE DIRIEZ-VOUS À CES FEMMES TOUCHÉES PAR LE CANCER DU SEIN?

C.B. Comme le disait une femme: «Le diagnostic est un TGV que l’on prend en pleine figure.» Après, viennent des questions de vie essentielles, la résilience. C’est une période dure, mais qui peut permettre de retourner au niveau de son être profond et retrouver de nouvelles priorités à son existence. Combattre même quand le cancer nous défigure, perte de cheveux, chamboulement familial, social, vulnérabilité, perte de l’emploi, départ du conjoint…  Traitements non remboursés, frais de garde d’enfants jusqu’au prix des perruques.  Un simple exemple: rembourser 250 francs la perruque à une femme retraitée alors qu’elle coûte entre 800 et 1000 francs. Encore une inégalité! Je fulmine.

ELLE SUISSE. PARLONS D’AMOUR ET DE CELUI QUI PARTAGE VOTRE VIE AUJOURD’HUI…

C.B. Jean-François, gynécologue mais qui serait plutôt un «femmologue». Il parle beaucoup avec ses patientes, mais sait les écouter. C’est juste un médecin humain, qui malgré une vie de fou, construit une relation profonde avec ses patientes. Je l’ai rencontré il y a dix ans et je suis amoureuse. Nous avons cinq enfants à nous deux.

ELLE SUISSE. QUELLE A ÉTÉ LA PLUS DURE ÉPREUVE DE VOTRE VIE?

C.B. Quand mon mari est parti avec la nounou de mes enfants vivre en Argentine! L’épreuve était trop forte, j’ai sombré… Quelque chose s’était éteint en moi. Mes enfants Charlotte et Arthur avaient 12 et 11 ans.

ELLE SUISSE. COMMENT AVEZ-VOUS VAINCU CES DÉPENDANCES COMME L’ALCOOL?

C.B. Un déclic. Le regard de mon fils. J’ai tout arrêté, tabac et alcool pour mes enfants et mon métier.

ELLE SUISSE. AUJOURD’HUI, ÊTES-VOUS UNE FEMME ACCOMPLIE EN HARMONIE AVEC VOTRE ÊTRE PROFOND?

C.B. Je suis extrêmement heureuse. Mon compagnon et mes deux enfants adultes y sont pour beaucoup. Jean-François a une intelligence émotionnelle impressionnante. Je souhaite à toutes les femmes du monde un Jean-François dans leur vie! Sa performance guide ma vie. On doit s’incliner devant plus fort que soi.

ELLE SUISSE. EN AMOUR, VOUS ÊTES D’UN TEMPÉRAMENT JALOUX OU TOTALEMENT CONFIANT?

C.B. Une confiance naïve au sens noble du terme. J’ai une joie de vivre indestructible.

ELLE SUISSE. QU’EST-CE QUI POURRAIT VOUS INTERPELLER OU RÉVOLTER DANS LA VIE AU QUOTIDIEN?

C.B. Dans mes combats professionnels, je n’ai pas peur et on ne peut pas faire pression sur moi!  Même financièrement. J’ai été protégée familialement de ce côté-là.

ELLE SUISSE. QUELLES SONT LES QUALITÉS DONT VOUS POUVEZ VOUS FÉLICITER?

C.B. La pugnacité. Je vais au but et rien ne m’arrête quand le combat en vaut la peine. Et par chance, j’ai un don: une mémoire infernale.

ELLE SUISSE. ET VOS DÉFAUTS… CEUX QUI VOUS DÉRANGENT VRAIMENT?

C.B. Je peux être insupportable et intransigeante. Je ne supporte pas la bêtise humaine. Et l’intolérance des gens qui se fient au paraître!

ELLE SUISSE. ÊTRE FEMME, UNE FORCE?

C.B. Oui. La vision sociale nous définit comme plus faible. Notre force cachée nous donne un pouvoir de jeu, voire de faire croire aux hommes que les idées viennent d’eux leur rend leur virilité. La femme est un de vie, de fécondité, d’amour et de communication. C’est pour cela que l’homme et la femme sont complémentaires! Je revendique ma féminité.

ELLE SUISSE. UN DICTON QUE VOUS FERIEZ VÔTRE?

C.B. La vie doit être au centre de l’humain.

La professeure Christine Bouchardy, une figure, une personnalité, une battante qui ne lâche rien! Redoutable. Et en plein «Octobre rose», mois international du cancer du sein, elle redouble de combativité. 

Elle se bat pour nous les femmes. Malgré ses nombreuses activités, dont on ne citera que quelques-unes: professeure ordinaire à la Faculté de médecine de l’Université de Genève, elle mettra sur pied le Programme genevois de dépistage du cancer du sein et a contribué à la création de l’Institut national d’épidémiologie du cancer en Suisse dont elle a été la vice-présidente. Mais c’est aussi une femme amoureuse, une mère aimante qui n’a pas été épargnée par la vie, mais dont la force de volonté est incroyable et exemplaire.

ELLE SUISSE. POURQUOI EST-CE SI IMPORTANT POUR VOUS «OCTOBRE ROSE»?

CHRISTINE BOUCHARDY. Très important pour moi et les concernées! Le cancer du sein est le cancer numéro 1 en Suisse, principalement en Romandie qui a pendant plusieurs années détenu le triste record d’avoir une des fréquences la plus élevée du monde. Il faut secouer les politiques pour qu’ils s’engagent dans ce combat.

ELLE SUISSE. ET POURQUOI CE TRISTE RECORD?

C.B. Plusieurs facteurs: les femmes ont des enfants plus tardivement et renoncent à l’allaitement, une alimentation calorique, la consommation d’alcool, un manque d’activité physique, le tabagisme. Les femmes ont eu aussi accès aux hormones (la prise de pilule s’est répandue massivement depuis le grand mouvement de la liberté sexuelle) et les hormones de substitution lors de la ménopause. Elles doivent cependant connaître les bénéfices et les risques et faire leur choix en toute connaissance de cause. Les gynécologues doivent en informer les femmes. Moi-même, j’ai fait le choix conscient d’en prendre.                                                                                                                                                               

ELLE SUISSE. QUELLE EST VOTRE PLUS GRANDE SATISFACTION OU GRAND BONHEUR AUJOURD’HUI?

C.B. Aujourd’hui à 64 ans, je peux me permettre d’être contente des combats menés, que ce soit pour le dépistage et le registre national de surveillance de cette maladie. L’expertise basée sur l’expérience du patient est essentielle. Grâce à leur expertise basée sur leur vécu, on va enfin pour la première fois traiter le cancer du sein dans sa globalité humaine et sociale et centrer nos actions sur leurs priorités. Grâce à elles, on a pu les mettre en avant. On devrait avoir une prise en charge gratuite du cancer du sein. Que les pharmas et les assurances mettent la main à la poche pour ne pas laisser ces malades dans une précarité sociale effrayante! C’est inacceptable.

ELLE SUISSE. VOTRE PLUS BELLE RENCONTRE, CELLE QUI A INFLUENCÉ VOTRE VIE.

C.B. Une patiente! Une femme hors du commun. Survivante après un cancer du sein elle a su, avec d’autres femmes, changer ma vision de la maladie. L’expertise des femmes atteintes est un trésor d’informations, qui doit devenir le fondement de tous nos combats.

ELLE SUISSE. QUE DIRIEZ-VOUS À CES FEMMES TOUCHÉES PAR LE CANCER DU SEIN?

C.B. Comme le disait une femme: «Le diagnostic est un TGV que l’on prend en pleine figure.» Après, viennent des questions de vie essentielles, la résilience. C’est une période dure, mais qui peut permettre de retourner au niveau de son être profond et retrouver de nouvelles priorités à son existence. Combattre même quand le cancer nous défigure, perte de cheveux, chamboulement familial, social, vulnérabilité, perte de l’emploi, départ du conjoint…  Traitements non remboursés, frais de garde d’enfants jusqu’au prix des perruques.  Un simple exemple: rembourser 250 francs la perruque à une femme retraitée alors qu’elle coûte entre 800 et 1000 francs. Encore une inégalité! Je fulmine.

ELLE SUISSE. PARLONS D’AMOUR ET DE CELUI QUI PARTAGE VOTRE VIE AUJOURD’HUI…

C.B. Jean-François, gynécologue mais qui serait plutôt un «femmologue». Il parle beaucoup avec ses patientes, mais sait les écouter. C’est juste un médecin humain, qui malgré une vie de fou, construit une relation profonde avec ses patientes. Je l’ai rencontré il y a dix ans et je suis amoureuse. Nous avons cinq enfants à nous deux.

ELLE SUISSE. QUELLE A ÉTÉ LA PLUS DURE ÉPREUVE DE VOTRE VIE?

C.B. Quand mon mari est parti avec la nounou de mes enfants vivre en Argentine! L’épreuve était trop forte, j’ai sombré… Quelque chose s’était éteint en moi. Mes enfants Charlotte et Arthur avaient 12 et 11 ans.

ELLE SUISSE. COMMENT AVEZ-VOUS VAINCU CES DÉPENDANCES COMME L’ALCOOL?

C.B. Un déclic. Le regard de mon fils. J’ai tout arrêté, tabac et alcool pour mes enfants et mon métier.

ELLE SUISSE. AUJOURD’HUI, ÊTES-VOUS UNE FEMME ACCOMPLIE EN HARMONIE AVEC VOTRE ÊTRE PROFOND?

C.B. Je suis extrêmement heureuse. Mon compagnon et mes deux enfants adultes y sont pour beaucoup. Jean-François a une intelligence émotionnelle impressionnante. Je souhaite à toutes les femmes du monde un Jean-François dans leur vie! Sa performance guide ma vie. On doit s’incliner devant plus fort que soi.

ELLE SUISSE. EN AMOUR, VOUS ÊTES D’UN TEMPÉRAMENT JALOUX OU TOTALEMENT CONFIANT?

C.B. Une confiance naïve au sens noble du terme. J’ai une joie de vivre indestructible.

ELLE SUISSE. QU’EST-CE QUI POURRAIT VOUS INTERPELLER OU RÉVOLTER DANS LA VIE AU QUOTIDIEN?

C.B. Dans mes combats professionnels, je n’ai pas peur et on ne peut pas faire pression sur moi!  Même financièrement. J’ai été protégée familialement de ce côté-là.

ELLE SUISSE. QUELLES SONT LES QUALITÉS DONT VOUS POUVEZ VOUS FÉLICITER?

C.B. La pugnacité. Je vais au but et rien ne m’arrête quand le combat en vaut la peine. Et par chance, j’ai un don: une mémoire infernale.

ELLE SUISSE. ET VOS DÉFAUTS… CEUX QUI VOUS DÉRANGENT VRAIMENT?

C.B. Je peux être insupportable et intransigeante. Je ne supporte pas la bêtise humaine. Et l’intolérance des gens qui se fient au paraître!

ELLE SUISSE. ÊTRE FEMME, UNE FORCE?

C.B. Oui. La vision sociale nous définit comme plus faible. Notre force cachée nous donne un pouvoir de jeu, voire de faire croire aux hommes que les idées viennent d’eux leur rend leur virilité. La femme est un de vie, de fécondité, d’amour et de communication. C’est pour cela que l’homme et la femme sont complémentaires! Je revendique ma féminité.

ELLE SUISSE. UN DICTON QUE VOUS FERIEZ VÔTRE?

C.B. La vie doit être au centre de l’humain.