Mercredi, le Conseil fédéral a reconnu la nécessité d’encadrer ce type de harcèlement d’une disposition légale. Ce projet de loi présenté par le Parlement intervient alors que les femmes sont les premières victimes.
Traquer les faits et les gestes d’une personne qui craindrait alors pour sa sécurité doit devenir une infraction en Suisse. C’est du moins le projet présenté en 2023 par le Parlement et qui s’est finalement vu soutenu par le Conseil fédéral mercredi 15 mai. Car bien qu’il existe déjà dans le pays des moyens civils et pénaux pour faire face à ce comportement, il ne demeure, comme l’indique la Prévention Suisse de la Criminalité (PSC), aucun élément constitutif qui le place comme illégal en tant que tel.
Pour la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N), antenne parlementaire à l’initiation de ce projet de loi, le « stalking » ne consiste pas uniquement en la traque (filature, espionnage, rencontres répétées inopportunes au travail ou au domicile) d’autrui. Il implique tout autant le harcèlement (cadeaux, contacts répétés par téléphone ou mail, réseaux sociaux) ou encore la menace (tentative d’intimidation, voies de fait, empiètement dans le logement ou la propriété) de ce dernier. Peu importe alors que l’auteur agisse dans le monde réel ou à travers des technologies informatiques, insiste la CAJ-N, l’ensemble de ces actes réalisés à répétition pouvant en effet susciter la crainte de la victime.
Plusieurs éléments encore à préciser
C’est à ce titre que le Conseil fédéral a ainsi publié un avis qui reconnaissait le besoin d’une telle disposition pénale en Suisse. L’autorité gouvernemental a toutefois souligné que cette dernière ne devait pas « nourrir des attentes trop élevées », car, selon lui, déterminer les entraves à la liberté individuelle reste complexe:
Il restera difficile, même en application d’une norme spécifique, de déterminer à partir de quel stade une personne se trouve entravée dans la libre détermination de sa façon de vivre, d’autant que des actes pris isolément peuvent ne pas constituer un comportement répréhensible.
Le Conseil fédéral a en outre souligné que l’application de la nouvelle norme pourra donner lieu à une charge de travail supplémentaire et à une augmentation des coûts de la poursuite pénale. Le Conseil fédéral propose alors que les éléments constitutifs du « stalking » ne soient réunis que si la victime se trouve entravée de manière intolérable, afin que les atteintes relativement légères ne soient pas punissables.
Finalement, selon les recommandations de la commission, il est primordial de ne déclencher des poursuites pénales qu’à la suite d’une plainte déposée par la victime, laquelle est la mieux à même de juger si elle se sent affectée dans sa sécurité ou sa liberté. Il est catégoriquement exclu d’entamer une procédure pénale contre la volonté de la victime. Et contrairement à l’avis de la commission, le Conseil fédéral soutient que les infractions devraient également être poursuivies sur plainte dans le cadre des relations conjugales.
Premières victimes: les femmes
Cette nouvelle intervient alors que la série Netflix Mon petit renne racontant le parcours d’un homme harcelé bat des records d’audience. Décrite comme une histoire vraie, la fiction a conduit de nombreux spectateurs à partir à la chasse de la réelle stalkeuse. Conséquence immédiate de cet embrasement médiatique à l’encontre de cette femme, Fiona Harvey, qui se déclare être la personne dépeinte dans la fiction, s’est vue obligée de témoigner sur un plateau télévisé.
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Du côté des scientifiques, le phénomène intéresse tout autant. Une revue des données épidémiologiques sur le stalking relayée en 2008 par la Revue médicale suisse a permis de mesurer l’importance de ce phénomène dans les sociétés occidentales. Selon les auteurs, 12 à 16% des femmes et 4 à 7% des hommes en sont les cibles durant leur vie, les femmes constituant l’énorme majorité des victimes (78%) et la première agression ayant le plus souvent lieu entre 18 et 29 ans.