Estelle Mayer: « Rien n’est jamais parfait, mais on peut s’en approcher »

16 décembre 2024 · Belinda Gervasoni

Entrepreneuse connue et reconnue de la Riviera suisse, elle gère cinq hôtels et restaurants: le Coucou, le Tralala, le Bla Bla, le Coco Mama, le Li Lo.

De son enfance, elle a gardé les souvenirs du restaurant de ses parents et grands- parents, et de deux générations de vrais bosseurs, comme elle le souligne, conduit par une passion commune et sans limite, pour un métier qu’Estelle Mayer a rêvé d’exercer. Une époque particulièrement douce, où l’art de s’amuser était plus sensé qu’aujourd’hui, où le partage était une valeur. Ce sens de la fête transmis par les siens, se retrouve dans les noms de ses établissements. Des mots qui chantent pour une identité marquante, une carrière construite autour des autres, une nature profondément positive et un sens de l’hospitalité qu’elle prend plaisir à conjuguer.

ELLE Suisse: Réussir dans la vie, ce n’est pas réussir sa vie… Êtes-vous d’accord avec cela?
Estelle Mayer: Je ne suis pas tout à fait d’accord. J’ai toujours tout fait pour allier les deux. Il faut trouver un bon compromis; rien n’est jamais parfait, mais on peut s’en approcher. Je suis mariée depuis vingt-trois ans, nous avons eu deux enfants, j’ai toujours travaillé. Tout est une question d’organisation.
 
Et justement votre vie, qu’en pensez-vous?
J’ai une vie plutôt heureuse! J’ai accompli presque tous mes rêves. Je ne regrette rien. Ou peut-être une seule chose: mes enfants ont grandi très vite, bien que j’ai fait le maximum pour être auprès d’eux, j’ai l’impression d’avoir loupé des petits chapitres. Parfois, j’ai eu quelques reproches «maman, toi tu ne fais pas de gâteaux», mais dans l’ensemble, j’ai fait de mon mieux.
 
Est-ce que l’hôtellerie et la restauration sont des métiers difficiles?
Après le Covid, il a fallu reconquérir la clientèle. Aujourd’hui, les gens attendent plus qu’un simple lunch, ils veulent vivre une expérience différente. C’est un métier où l’on se demande toujours ce que l’on peut offrir de plus, on se remet en question sans cesse. On est dans l’émotionnel, la séduction, la bienveillance, l’hospitalité et le management. J’ai appris tout cela sur le terrain. Parfois, c’est un peu plus difficile de gérer l’humain, mais c’est notre fonds de commerce, la nature humaine est vaste, et puis on apprend! Je me nourris de cela. 
 
Quelles qualités faut-il?
Être positif, quoiqu’il arrive; il n’y a pas de problème, que des solutions!

Il faut savoir être altruiste, à l’écoute des gens, sentir ce qu’ils attendent lorsqu’ils franchissent la porte de votre établissement.

Estelle Mayer, présidente de Swiss Hotels Association

Quels sont vos défauts?
Le manque de confiance en moi, la peur de ne pas faire assez bien, et puis je suis parfois trop dans l’émotion!
 
N’est-ce pas compliqué lorsque l’on est autant que vous dans la représentation?
J’arrive à mettre de côté mes humeurs personnelles, les problèmes restent à la maison. Je me suis forgée une sorte de protection, c’est instinctif. Il faut mettre des limites à l’empathie et à l’écoute, pour ne pas se faire trop envahir. Je ne partage pas l’intime, je me livre parfois, mais pas avec n’importe qui et pas n’importe comment.
 
Vous travaillez avec votre mari, quel est votre secret?
Ça ne se passe pas trop mal, car on a chacun sa zone d’activité. Je lui ai transmis ma passion pour ce métier mais je n’ai rien à lui apprendre! Lui s’occupe de toute la partie budget et finance depuis deux ans, il est plutôt réservé et n’aime pas se mettre en avant. Moi, je suis tous les jours auprès de mes équipes et de ma clientèle.
 
Quelle a été l’épreuve la plus difficile de votre vie?
Lorsque l’on commence à voir partir des proches, des amis, parce qu’ils sont touchés par la maladie… c’est très douloureux.
 
Vous enfermez-vous dans votre coquille ou avez-vous besoin des vôtres pour surmonter un chagrin?
Au contraire, j’exulte! J’ai besoin des autres. Je ne suis pas quelqu’un de très solitaire. J’aime bien avoir la paix de temps en temps, mais je n’aime pas la solitude! J’aime prévoir des rencontres; même quand j’ai congé, j’organise des dîners par exemple!

Je ne partage pas l’intime, je me livre parfois, mais pas avec n’importe qui et pas n’importe comment.

Estelle Mayer, présidente de Swiss Hotels Association

Racontez-nous un grand bonheur inattendu.
Je ne l’ai pas encore vécu! Ce sera le jour où je serai grand-mère, où je découvrirai la bouille de mes petits enfants…
 
Quelle amoureuse êtes-vous?
Passionnée mais prudente! Il ne faut pas tout dévoiler. J’essaie de cacher encore deux trois choses, de donner au compte-gouttes, modérément. Il faut savoir garder une part de mystère, même après vingt-trois ans! La passion, c’est une chose, mais on sait que sur la longueur elle ne dure pas, à un moment donné on s’aime un peu par défaut. On devient des partenaires sur une route semée d’embûches. Donc il faut faire beaucoup de compromis, savoir pardonner, et se souvenir que l’on est des âmes sœurs. Si ça dure, c’est qu’il y a toujours de l’amour. Sinon, il faut partir!

Je n’ai pas peur de vieillir, je regrette juste qu’avec les années on perde un peu de sa superbe! (Rires).

Estelle Mayer, présidente de Swiss Hotels Association

Qu’est-ce qui pourrait vous interpeller ou vous révolter au quotidien?
L’injustice et le manque de valeur de la nouvelle génération pour les fondamentaux.

Avez-vous peur de vieillir?
Je n’ai pas peur de vieillir, je regrette juste qu’avec les années on perde un peu de sa superbe! (Rires).

Pourriez-vous dire que vous êtes une femme heureuse envers et contre tout?
Oui. On ne l’est jamais à 100%; mais si quelque chose ne va pas, j’essaie toujours de le régler ou de l’améliorer, pour que le temps qui reste soit le plus heureux possible.

Qu’est ce qui vous fait avancer?
Les nouveaux projets et être un peu novateur dans notre domaine. Et puis, j’ai hâte de prendre le temps de voyager, d’entamer la liste des pays qu’il me reste à découvrir. Mais je n’arrêterai jamais vraiment de travailler, ça conduirait à ma petite mort! Je lèverai le pied quand je serai vraiment fatiguée, mais ça n’est pas demain la veille!
 
Une devise que vous feriez vôtre?
Toujours rester positif!

Tags : vaud · hôtel · restaurant

Entrepreneuse connue et reconnue de la Riviera suisse, elle gère cinq hôtels et restaurants: le Coucou, le Tralala, le Bla Bla, le Coco Mama, le Li Lo.

De son enfance, elle a gardé les souvenirs du restaurant de ses parents et grands- parents, et de deux générations de vrais bosseurs, comme elle le souligne, conduit par une passion commune et sans limite, pour un métier qu’Estelle Mayer a rêvé d’exercer. Une époque particulièrement douce, où l’art de s’amuser était plus sensé qu’aujourd’hui, où le partage était une valeur. Ce sens de la fête transmis par les siens, se retrouve dans les noms de ses établissements. Des mots qui chantent pour une identité marquante, une carrière construite autour des autres, une nature profondément positive et un sens de l’hospitalité qu’elle prend plaisir à conjuguer.

ELLE Suisse: Réussir dans la vie, ce n’est pas réussir sa vie… Êtes-vous d’accord avec cela?
Estelle Mayer: Je ne suis pas tout à fait d’accord. J’ai toujours tout fait pour allier les deux. Il faut trouver un bon compromis; rien n’est jamais parfait, mais on peut s’en approcher. Je suis mariée depuis vingt-trois ans, nous avons eu deux enfants, j’ai toujours travaillé. Tout est une question d’organisation.
 
Et justement votre vie, qu’en pensez-vous?
J’ai une vie plutôt heureuse! J’ai accompli presque tous mes rêves. Je ne regrette rien. Ou peut-être une seule chose: mes enfants ont grandi très vite, bien que j’ai fait le maximum pour être auprès d’eux, j’ai l’impression d’avoir loupé des petits chapitres. Parfois, j’ai eu quelques reproches «maman, toi tu ne fais pas de gâteaux», mais dans l’ensemble, j’ai fait de mon mieux.
 
Est-ce que l’hôtellerie et la restauration sont des métiers difficiles?
Après le Covid, il a fallu reconquérir la clientèle. Aujourd’hui, les gens attendent plus qu’un simple lunch, ils veulent vivre une expérience différente. C’est un métier où l’on se demande toujours ce que l’on peut offrir de plus, on se remet en question sans cesse. On est dans l’émotionnel, la séduction, la bienveillance, l’hospitalité et le management. J’ai appris tout cela sur le terrain. Parfois, c’est un peu plus difficile de gérer l’humain, mais c’est notre fonds de commerce, la nature humaine est vaste, et puis on apprend! Je me nourris de cela. 
 
Quelles qualités faut-il?
Être positif, quoiqu’il arrive; il n’y a pas de problème, que des solutions!

Il faut savoir être altruiste, à l’écoute des gens, sentir ce qu’ils attendent lorsqu’ils franchissent la porte de votre établissement.

Estelle Mayer, présidente de Swiss Hotels Association

Quels sont vos défauts?
Le manque de confiance en moi, la peur de ne pas faire assez bien, et puis je suis parfois trop dans l’émotion!
 
N’est-ce pas compliqué lorsque l’on est autant que vous dans la représentation?
J’arrive à mettre de côté mes humeurs personnelles, les problèmes restent à la maison. Je me suis forgée une sorte de protection, c’est instinctif. Il faut mettre des limites à l’empathie et à l’écoute, pour ne pas se faire trop envahir. Je ne partage pas l’intime, je me livre parfois, mais pas avec n’importe qui et pas n’importe comment.
 
Vous travaillez avec votre mari, quel est votre secret?
Ça ne se passe pas trop mal, car on a chacun sa zone d’activité. Je lui ai transmis ma passion pour ce métier mais je n’ai rien à lui apprendre! Lui s’occupe de toute la partie budget et finance depuis deux ans, il est plutôt réservé et n’aime pas se mettre en avant. Moi, je suis tous les jours auprès de mes équipes et de ma clientèle.
 
Quelle a été l’épreuve la plus difficile de votre vie?
Lorsque l’on commence à voir partir des proches, des amis, parce qu’ils sont touchés par la maladie… c’est très douloureux.
 
Vous enfermez-vous dans votre coquille ou avez-vous besoin des vôtres pour surmonter un chagrin?
Au contraire, j’exulte! J’ai besoin des autres. Je ne suis pas quelqu’un de très solitaire. J’aime bien avoir la paix de temps en temps, mais je n’aime pas la solitude! J’aime prévoir des rencontres; même quand j’ai congé, j’organise des dîners par exemple!

Je ne partage pas l’intime, je me livre parfois, mais pas avec n’importe qui et pas n’importe comment.

Estelle Mayer, présidente de Swiss Hotels Association

Racontez-nous un grand bonheur inattendu.
Je ne l’ai pas encore vécu! Ce sera le jour où je serai grand-mère, où je découvrirai la bouille de mes petits enfants…
 
Quelle amoureuse êtes-vous?
Passionnée mais prudente! Il ne faut pas tout dévoiler. J’essaie de cacher encore deux trois choses, de donner au compte-gouttes, modérément. Il faut savoir garder une part de mystère, même après vingt-trois ans! La passion, c’est une chose, mais on sait que sur la longueur elle ne dure pas, à un moment donné on s’aime un peu par défaut. On devient des partenaires sur une route semée d’embûches. Donc il faut faire beaucoup de compromis, savoir pardonner, et se souvenir que l’on est des âmes sœurs. Si ça dure, c’est qu’il y a toujours de l’amour. Sinon, il faut partir!

Je n’ai pas peur de vieillir, je regrette juste qu’avec les années on perde un peu de sa superbe! (Rires).

Estelle Mayer, présidente de Swiss Hotels Association

Qu’est-ce qui pourrait vous interpeller ou vous révolter au quotidien?
L’injustice et le manque de valeur de la nouvelle génération pour les fondamentaux.

Avez-vous peur de vieillir?
Je n’ai pas peur de vieillir, je regrette juste qu’avec les années on perde un peu de sa superbe! (Rires).

Pourriez-vous dire que vous êtes une femme heureuse envers et contre tout?
Oui. On ne l’est jamais à 100%; mais si quelque chose ne va pas, j’essaie toujours de le régler ou de l’améliorer, pour que le temps qui reste soit le plus heureux possible.

Qu’est ce qui vous fait avancer?
Les nouveaux projets et être un peu novateur dans notre domaine. Et puis, j’ai hâte de prendre le temps de voyager, d’entamer la liste des pays qu’il me reste à découvrir. Mais je n’arrêterai jamais vraiment de travailler, ça conduirait à ma petite mort! Je lèverai le pied quand je serai vraiment fatiguée, mais ça n’est pas demain la veille!
 
Une devise que vous feriez vôtre?
Toujours rester positif!

Tags : vaud · hôtel · restaurant