Clap de fin pour l’ère des collaborations au sein de la maison française. La marque éponyme de Jean-Paul Gaultier a amorcé mardi un nouveau chapitre sous la direction d’un créateur néerlandais au talent protéiforme.

C’est désormais officiel : l’Enfant terrible de la mode a trouvé son héritier. Duran Lantink, prodige néerlandais de 38 ans, est devenu mardi 15 avril le nouveau directeur artistique permanent de l’iconique maison éponyme. Une nomination qui scelle la fin de l’ère des collaborations ponctuelles initiée après la retraite de Jean-Paul Gaultier, et marque un nouveau départ pour la marque du groupe Puig.
Qui est Duran Lantink ?
Révélé il y a huit ans dans la mode face aux vitrines de Fred van Vordragen à La Haye -, Duran Lantink s’est imposé comme l’un des talents les plus subversifs de sa génération. Lauréat du prix spécial de l’ANDAM en 2023, du Karl Lagerfeld Prize chez LVMH en 2024, et tout récemment du prestigieux Woolmark Prize, il collectionne les distinctions comme d’autres les silhouettes explosives.
Quel est le style de Duran Lantink ?
On doit au créateur néerlandais des looks inoubliables portés par Beyoncé ou Janelle Monáe, des vêtements-hybrides où se croisent prothèses gonflables, découpes chirurgicales et imprimés prédateurs. Chez lui, l’irrévérence est une seconde peau, l’humour une matière première, et la provocation une discipline savamment maîtrisée. Rien d’étonnant, donc, à ce que la rumeur persistante qui agitait le milieu ces dernières semaines se voie confirmée : Duran Lantink est l’évidence Gaultier.
Comment Duran Lantink et Jean-Paul Gaultier se sont-il rencontrés?
C’est au sein du laboratoire créatif qu’est devenue la maison Jean Paul Gaultier depuis la retraite de son fondateur que s’est dessinée, en filigrane, la connexion entre Duran Lantink et l’Enfant Terrible originel. Dernier invité d’une série de collaborations prestigieuses débuté en 2020 – de Chitose Abe (2021) à Glenn Martens (2022), en passant par Haider Ackermann (2023) et Simone Rocha (2024) -, le créateur néerlandais a signé en 2025 une collection furieusement radicale, visionnaire sans être irrespectueuse, qui a résonné comme une évidence au sein de la submersive maison. Silhouettes gonflables, découpes subversives, féminités plurielles : Duran Lantink a su parler le langage du Français avec un accent singulier.
« Je retrouve en lui la même énergie, la même audace, le même esprit ludique que j’avais à mes débuts », confie Jean-Paul Gaultier à propos de celui qu’il intronise comme son héritier légitime. « C’est le nouvel « Enfant terrible de la mode ». Bienvenue, Duran. » Un adoubement vibrant d’émotion, émanant du fondateur de la maison qui a fait de la transgression un art. Une reconnaissance que Duran Lantink accueille avec une gratitude teintée d’admiration pour celui qui a redéfini les contours du genre et du vêtement. « Jean Paul Gaultier est un génie, un pionnier qui a fait tomber les barrières pour que des gens comme nous puissent les franchir sans avoir à s’excuser d’être eux-mêmes. » Devenir aujourd’hui le directeur artistique de cette maison mythique ? « Un honneur absolu », affirme-t-il. Une passation de flambeau aussi symbolique que brûlante, qui promet d’écrire un nouveau chapitre incandescent dans l’histoire de la couture française.
Ainsi s’est refermée l’ère des directions artistiques à géométrie variable.
Pourquoi l’arrivée de Duran Lantink chez Jean Paul Gaultier est une évidence ?
Si certaines nominations font lever un sourcil, celle de Duran Lantink à la tête de Jean Paul Gaultier s’impose comme une évidence. Chez lui, le corps est matière d’enquête, les volumes, matière à déconstruction. Son esthétique brouille les frontières du genre, provoque, questionne, secoue les certitudes d’une mode parfois anesthésiée. Un théâtre du vêtement que Jean Paul Gaultier aurait sans doute applaudi, tant il partage avec Lantink ce goût de l’irrévérence, du subversif habillé d’ironie, du tissu comme manifeste.
Cette nouvelle ère ne signe pas seulement l’arrivée d’un directeur artistique permanent après des saisons de collaborations éclatées : elle marque aussi le grand retour du prêt-à-porter chez Gaultier, suspendu depuis 2014. Un virage stratégique attendu, comme l’explique Antoine Gagey, directeur général de la maison, à Business of Fashion : « Il existe une réelle demande pour Jean Paul Gaultier, en particulier chez les jeunes qui se reconnaissent dans ses valeurs. Mais pour porter la marque à son plein potentiel, il faut désormais inscrire son développement dans une structure plus stable, plus cohérente entre les catégories et les saisons. »
Quand aura lieu la première collection de Duran Lantink chez Jean Paul Gaultier ?
Pour mieux épouser ce nouveau chapitre, le créateur néerlandais met en suspens son propre label éponyme, dont les collections hybrides avaient pourtant su séduire critiques et publics en un temps record. Un geste de pleine dévotion.
« J’ai énormément de respect pour Monsieur Gaultier et pour son héritage en couture », confie-t-il à Business of Fashion. « Je veux m’accorder le temps d’apprendre, d’écouter, de m’imprégner du savoir-faire des mains expertes qui composent les ateliers de la maison. »
Et pour ce nouveau chapitre, le lever de rideau est prévu en septembre 2025, avec la collection Printemps-Été 2026.