À Andorra Taste, Zineb Hattab, la cheffe qui fait rayonner la cuisine végétale depuis Zurich 

ELLE Suisse : Parlez-nous de votre parcours…
Zineb Hattab : J’ai commencé comme ingénieure, mais j’ai vite compris que la cuisine occupait une place centrale dans ma vie. J’ai voyagé, appris différentes techniques, expérimenté. Je dirais que c’est mon métier qui m’a trouvée, pas l’inverse. C’est une vraie transformation.

La passion pour la cuisine, est-ce un héritage familial ?
Manger a toujours été une façon de célébrer. Mes parents travaillaient beaucoup, mais mes grands-parents et mes tantes cuisinaient pour toute la famille, c’était leur langage de l’amour. Moi, j’ai commencé à cuisiner à l’université pour mon entourage. Leurs retours enthousiastes m’ont donné envie d’aller plus loin. En pratiquant, j’ai découvert à quel point cette passion me correspondait.

Vous avez vécu aux États-Unis, en Espagne, en Italie… Pourquoi choisir d’ouvrir des restaurants en Suisse ?
J’y suis arrivée en 2012 comme développeuse de logiciels. Cette vie me plaisait, mais j’ai commencé à cuisiner pendant mon temps libre. Lorsque j’ai voulu ouvrir mon propre restaurant, la Suisse m’a semblé l’endroit idéal : équilibre de vie, qualité, valeurs humaines. Il était important pour moi de bien traiter mes équipes, de les rémunérer justement et de leur offrir des vacances, ce que la Suisse permet.

Présentez-nous vos trois établissements à Zurich.
KLE est mon premier-né, inspiré de ma vie d’adulte, et qui casse les clichés sur la cuisine végétale : les gens sont souvent surpris par la richesse des saveurs. DAR rend hommage à mes racines marocaines et espagnoles, autour d’une cuisine conviviale et chaleureuse. COR est notre bar à vins avec tapas, sans réservation, pour un moment décontracté entre amis ou en famille. Ce sont trois expériences culinaires distinctes.

D’où est venue l’envie de passer au tout végétal ?
Au départ, mon restaurant KLE n’était pas censé être végétalien. Il y avait du fromage au menu. Mais juste avant l’ouverture en 2020, j’ai ressenti le besoin de proposer autre chose, avec un impact positif. J’ai fait le pari du végétal, en travaillant avec des fermes locales. C’était risqué, mais je ne regrette rien.

Quels sont les avantages d’une cuisine végétale ? 
Ils sont nombreux ! Bien sûr, tout le monde ne deviendra pas végane. Mais on peut tous se poser les bonnes questions : est-il nécessaire de manger des animaux chaque jour ? Peut-on réduire un peu ? Même de petits changements ont un impact énorme sur l’environnement, la santé, la déforestation. Revenir aux saisons, se reconnecter à la nature, c’est essentiel.

La cuisine végétale peut-elle incarner une haute gastronomie alpine ? 
Absolument. À Andorra Taste, j’ai voulu montrer qu’on peut créer des desserts aussi gourmands que ceux à base de produits laitiers, sans en utiliser ! En Suisse, pays des vaches, du fromage et du chocolat, c’est un vrai défi (rires). Mais on peut tout réinventer : le végétal ne manque de rien.

Vous êtes la première cheffe végétalienne en Suisse à recevoir les étoiles rouge et verte Michelin. Que représente cette reconnaissance ?
L’étoile rouge pour KLE a été une immense surprise. Je ne pensais pas qu’un restaurant végétalien serait sélectionné ! C’est une consécration pour mon équipe, et une fierté pour nos clients. Certains hésitaient à venir et ont franchi le pas grâce à cette récompense. Ensuite, l’étoile verte, obtenue pour KLE et DAR, a salué notre engagement, axé sur le travail avec des producteurs locaux et la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Vous avez publié un livre de recettes, Taste of Love, en 2022. Un nouveau projet en cours ?
Le titre vient des retours de nos clients, qui disent souvent ressentir de l’amour dans nos plats. C’est pour eux que je l’ai choisi. Et oui, je travaille actuellement sur un nouvel ouvrage culinaire qui sortira au printemps 2026.

Un dernier mot pour inviter nos lectrices à découvrir vos adresses ? 
Soyez curieuses ! Osez goûter de nouvelles saveurs, et nous serons ravis de vous accueillir.