LE BEAU VOYAGE À NANTES

Pour un jour, un séjour ou pour toujours, cette ville d’art et d’histoire réserve un généreux accueil.

Le Voyage à Nantes, c’est la conjonction du tourisme, de la culture et du patrimoine. Sous la forme d’un parcours permettant de découvrir une ville complètement transformée. À l’arrivée à la mairie de Jean-Marc Ayrault, en 1989, les chantiers navals sont fermés, la désindustrialisation suscite chômage et pauvreté. Appel est lancé à un enchanteur urbain, Jean Blaise. Après avoir fait de l’ancienne biscuiterie Lu un espace de bouillonnement artistique, le « Lieu unique », ce détonateur culturel a l’idée d’un itinéraire dispensant surprises et découvertes. Une ligne verte longue de 22 kilomètres guide à travers rues et ruelles.

Si l’on commençait par une visite aux Machines de l’île, sur les quais de la Loire, histoire d’entendre barrir le Grand Éléphant ? Douze mètres de hauteur, 48 tonnes… ce pachyderme de bois et d’acier peut embarquer pas moins de 50 personnes. Tout aussi mécanique et onirique, le bestiaire de la Galerie compte une fourmi géante, une araignée, un héron, un caméléon articulés. À n’en pas croire ses yeux. Dans le voisinage, voici le Mémorial de l’abolition de l’esclavage. On ne saurait éluder que les navires nantais ont transporté 550’000 Africains vers les colonies.

La gare de Nantes mérite aussi le détour. Œuvre de l’architecte Rudy Ricciotti, elle prend la forme d’une passerelle-mezzanine de 160 mètres de long offrant une vue dégagée sur la ville. Souvenir des années fastes, le Passage Pommeraye que l’on dit unique en Europe a été construit sur trois niveaux au XIXe. Néo-classicisme et éclectisme s’y mêlent étroitement. De part et d’autre de l’escalier monumental que surmonte une impressionnante verrière s’étagent des galeries en mezzanine. Incontournable, le château des ducs de Bretagne (XVe – XVIIIe siècles) accueille le musée d’histoire de la ville. Un artiste proposa naguère de loger des loups dans les douves. Devant la levée de boucliers, l’idée fut écartée… Mais d’autres projets furent retenus pour le plus grand plaisir des promeneurs. Les enseignes de magasins, par exemple, confiées à des plasticiens particulièrement imaginatifs. Car le Voyage à Nantes n’en finit pas de susciter l’étonnement. Au fil de la ligne verte, plus de 120 œuvres sont à découvrir dans l’espace public. Du centre-ville à l’océan ainsi que dans le vignoble (on a tendance à oublier que le muscadet est un produit phare du pays nantais). Ici des bottes géantes de Lilian Bourgeat, là des anneaux lumineux de Daniel Buren et Patrick Bouchain, là-bas le bronze Éloge du pas de côté du sculpteur Philippe Ramette qui rend hommage à l’audace dont fait preuve la ville et à son investissement dans le développement durable. Sur ce modèle, le Voyage à Nantes refuse le tourisme de masse et réfute le tourisme de classe.