C’est le style le plus controversé de la saison. Voici pourquoi il est génial.
Les moqueries sont désormais des statement stylistique. Et oui! S’habiller « comme si on se trouvait dans le noir » ne sous-entend plus un faux pas vestimentaire, mais incarne aujourd’hui une esthétique volontairement désinvolte. Née sur les podiums, cette allure pensée pour paraître instinctive est des plus résolument contemporaine.
Et cette saison, l’exubérance est de mise : les créateurs invitent les fashionistas à superposer les pièces les plus audacieuses dans un jeu de contrastes assumé. L’idée ? Oublier la modération et tout porter à la fois — pourvu que ça claque. Un maillot de rugby rayé avec ce vieux pull chiné au marché, rehaussé d’une jupe à sequins éclatante. Une robe fleurie désaccordée avec un manteau graphique. Le tout ponctué d’une écharpe rayée qui détonne. Un exercice de style parfaitement orchestré par la marque milanaise No21.
Mais cette marque est loin d’être la seule à adopter cette approche du tout-aller pour la saison. Parmi les autres marques à l’affiche, on trouve Versace, où Donatella a mélangé imprimés et textures, une première dans une collection Versus de 1997. Même constat chez Miu Miu, où ses tissus d’archives ont contrasté avec de nouveaux motifs, puis ont été associés à des mocassins épais et des chaussettes noires d’uniforme.
L’esthétique du « je me suis habillé·e dans le noir » tombe à pic. Elle surgit alors que s’essouffle le règne de la perfection calibrée, prônée par les tendances du « Quiet Luxury » et de l’ultra-minimalisme. Bien sûr, il y aura toujours une place pour la chemise blanche impeccable et le cachemire camel, mais cette nouvelle allure revendique un chaos maîtrisé, un retour à l’instinct, à l’expression personnelle et à une créativité un temps étouffée.
Dès les premiers visuels des collections printemps-été 2025, cette approche a séduit. Non seulement pour sa fraîcheur ludique, mais aussi pour la manière dont elle incite à redécouvrir sa garde-robe — à mélanger l’ancien, le décalé et l’inattendu, plutôt que de céder aux diktats du nouveau bien lisse.

Difficile de nier l’appréhension que cette tendance peut susciter lors d’une première tentative. Ces dernières saisons, les courants stylistiques ont privilégié des équations faciles : un jean droit ici, une chaussure argentée là. Mais cette approche du contraste maximal demande un peu plus d’audace – et soulève une question légitime : où se situe la frontière entre allure dépareillée et désastre stylistique ?
La clé d’un look « habillé dans le noir » réussi ? Miser sur des pièces que l’on aurait déjà portées dans un contexte plus détendu. Si une nouveauté s’impose, autant qu’elle soit vive, audacieuse, et chargée de personnalité. En somme, inutile d’opter pour une silhouette ouvertement conceptuelle si le confort – esthétique comme émotionnel – n’est pas au rendez-vous.
Car comme souvent dans la mode, ce n’est pas tant ce que l’on porte que la façon dont on le porte qui fait toute la différence. Et c’est précisément dans ce chaos maîtrisé que l’on trouve une nouvelle forme de liberté.
Autrice : Naomi Pike
Cet article a été traduit et adapté pour la Suisse après avoir initialement été publié sur elle.com/uk. Retrouvez tous les autres articles de cette édition sur le site web officiel.