« C’est horrible ! » : pourquoi la nouvelle vidéo de Valentino choque le public

Fashion faux-pas de l’année ? Lundi, la prestigieuse maison italienne a dévoilé son nouveau sac dans une vidéo. Or, la publicité a provoqué stupeur et colère auprès des passionné.e.s de mode. L’affaire remet dans le même temps en question tout un écosystème créatif, et ce, jusqu’en Suisse.
« Horrible », « cheap », « tellement décevant ». Sous la dernière publication de Valentino, les commentaires fusent, et ne sont pas tendres. La raison ? Lundi 1er décembre, la maison de luxe a révélé la campagne vidéo de son nouveau sac « DeVain », réalisée grâce à une intelligence artificielle (IA) par un « artiste multidisciplinaire » nommé Total Emotional Awareness. Résultat : un montage « surréaliste », décrit la maison, mêlant mannequins, logos Valentino et accessoire star dans un jeu de morphisme.
Avanlanche de critiques
Mais l’effet avant-gardiste escompté par la prestigieuse maison italienne n’a pas pris. Sur les réseaux sociaux, les amateurs de mode ont oscillé entre incompréhension et consternation face à une réalisation jugée « dérangeante » : « Traitez-moi de rabat-joie, mais ça fait bas de gamme et ça ne colle pas à l’image de la marque », tacle l’un. « L’IA ne rivalisera jamais avec le luxe et l’artisanat », déplore un autre. « Je ne pensais pas voir des pubs générées par IA venant de Valentino dans mon feed », s’étonne un troisième. Dans cette avalanche de critiques, un sentiment est largement revenu : celui d’une communication considérée comme « bâclée » par une maison pourtant réputée pour son raffinement. « Quand on paie vos prix, on s’attend à mieux », assène un commentaire massivement liké.
Quand on paie vos prix, on s’attend à mieux.

Pour Rebecca Swift, vice-présidente de la création chez Getty Images, rien d’étonnant à cette levée de boucliers : beaucoup perçoivent encore le contenu généré par IA comme moins qualitatif que les œuvres humaines, explique-t-elle à la BBC. Anne-Liese Prem, responsable des études culturelles et des tendances chez Loop, y voit même le symptôme d’un malaise plus profond : « Le problème n’est pas la technologie, mais ce qu’elle semble remplacer. […] Quand l’IA s’invite dans l’identité visuelle d’une marque, le public craint qu’elle sacrifie l’esthétique au profit de l’efficacité. »
Le problème n’est pas la technologie, mais ce qu’elle semble remplacer.
Des inquiétudes au regard de nombreuses autres marques
L’affaire Valentino n’est pas un cas isolé. Quelques mois plus tôt, Guess a été mis en cause quand un de ses visuels publicitaires dans Vogue présentait un mannequin entièrement généré par IA – un choix dénoncé comme « déshumanisant », rapportait The Independant. De même, H&M a dernièrement révélé qu’il comptait lancer des clones numériques de ses mannequins pour ses campagnes, une décision qui avait suscité des inquiétudes sur les réseaux – beaucoup y voyant un pas de plus vers l’uniformisation et la perte d’authenticité.
En Suisse aussi, le débat est loin d’être abstrait : l’essor de l’IA inquiète nombre de créateurs – photographes, illustrateurs, artistes – qui craignent pour leurs droits et la valeur de leur travail. Chez ELLE Suisse, alors que Meta introduisait début d’année son nouvel outil d’intelligence artificielle basée sur les photos – et donc créations – de ses utilisateurs, nombre de designers tels que Jacqueline Loekito craignaient que l’IA générative risque de « cacher le travail de talentueux créateurs helvétiques » selon eux déjà trop peu visibles sur la scène internationale.
L’IA va invisibiliser le travail de talentueux créateurs helvétiques alors qu’il y a déjà très peu de soutien interne en Suisse permettant d’accroître leur visibilité.