Rencontre avec l’actrice Elodie Fontan : « Le plus beau des rôles est celui de maman »

Au cinéma, la lumineuse actrice captive des millions de spectateurs. Hors caméra, elle met cette force au service des femmes touchées par le cancer.
À 9 ans, elle faisait ses débuts dans Le plus beau métier du monde (1996). Dix ans plus tard, la série Clem (2010-2025) l’imposait comme un visage familier du petit écran, avant qu’elle ne triomphe au cinéma dans Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu? (2014), Alibi.com (2017), Super-héros malgré lui (2021) ou Anges & Cie (2025). En février 2026, Élodie Fontan sera encore à l’affiche avec son compagnon Philippe Lacheau dans la comédie très attendue de ce dernier, Marsupilami.
Depuis 2023, l’actrice française, cavalière depuis l’enfance, a choisi d’engager sa notoriété dans la mise en lumière de l’association Hope, qui aide les femmes touchées par le cancer à se reconstruire grâce à l’équithérapie et à l’art-thérapie. Fondée par Annabel Brourhant, elle-même confrontée à quatre reprises à la maladie, Hope compte une antenne en Suisse et organise aussi des séjours dans son centre équestre de Saint-Cergues (F), près de Genève. Fin septembre, Élodie Fontan y a partagé une journée intense aux côtés de douze participantes. L’occasion pour la maman d’un petit Raphaël de 5 ans de se confier sur son engagement, son parcours… et ce qui compte vraiment.
ELLE Suisse : Vous vous engagez dans le soutien des personnes atteintes de cancer. Pourquoi cette cause vous touche-t-elle particulièrement ?
Élodie Fontan : Je crois que rares sont les gens qui n’ont pas un proche qui s’est battu ou se bat contre un cancer. J’ai vécu une année, hélas très difficile, où j’ai perdu un ami que j’aimais très fort et mon tonton. Et j’ai encore quelqu’un qui se bat contre cette maladie de merde.
Lors d’un atelier, vous avez été émue aux larmes.
Je pensais justement à cette personne. Je ne m’attendais pas à craquer. D’habitude, je parviens à masquer mes émotions, sinon je pourrais pleurer sans fin. Mais là, c’était trop fort, trop beau aussi. J’aimerais que toutes celles qui se battent contre le cancer puissent vivre ces stages et que ça puisse leur apporter du courage, de la force et de l’optimisme.
Comment êtes-vous devenue marraine de l’association ?
Je suis venue avec une amie à leur gala en 2023. Les participantes jouaient une comédie musicale et je me suis pris une claque. C’était une performance incroyable pour des femmes qui n’avaient jamais fait ça. D’autant que moi, la scène, ce n’est vraiment pas mon truc. Sur un plateau, je suis très à l’aise – mon papa était journaliste caméraman, j’ai toujours vécu avec une caméra – mais être sur scène, c’est une punition. À la fin du spectacle, Annabel Brourhant est venue me voir. Je lui ai dit tout le bien que j’en pensais et elle m’a demandé si je voulais devenir marraine. Je n’ai pas hésité. Elle l’a annoncé le soir même au public et… m’a poussée à monter sur scène! (Rires).

Rares sont les gens qui n’ont pas un proche qui s’est battu ou se bat contre un cancer.
C’est le fait d’être souvent filmée par votre père qui vous a donné envie d’être actrice ?
Ça s’est plutôt fait par hasard : mon papa a fait un reportage sur un photographe qui a ensuite voulu faire des photos de moi. Pour cela, il fallait passer par une agence. Et de là, j’ai commencé, à 5 ans, à faire des photos et tourner des publicités, puis un film à 9 ans, puis des séries.
Avec un tel recul, quel regard portez-vous sur l’évolution du cinéma, notamment la place accordée aux femmes ?
L’évolution est positive. Il était temps ! On accorde beaucoup plus de confiance aux femmes. On veut les voir avec de jolis rôles, porter des projets, réaliser. Je peux l’attester : je n’ai pas encore de projet en tête, mais plusieurs producteurs m’ont déjà demandé si j’avais envie de réaliser. Ce qui n’a jamais été le cas avant.
Quel genre d’enfant étiez-vous ?
Assez sage, très timide, assez sauvage. Puis ado, j’ai fait des conneries mignonnes, comme faire le mur, mais pas de grosses bêtises.
À l’école, c’était difficile d’être « l’actrice » ?
Ce n’était pas toujours cool. Les gamins sont durs, le moindre prétexte est bon à se faire charrier. On m’a longtemps appelée par le nom de mes pubs, surtout «Alsa». C’était agaçant, mais pas au point de vouloir arrêter.
Avez-vous envisagé une autre carrière ?
Oui. À 18 ans, mes parents m’ont demandé d’assurer quand même un autre métier. J’ai voulu être journaliste, comme mon papa. Je me suis inscrite dans un nouveau parcours pour journalistes : Sciences Po, langues et histoire. Mais faute d’inscrits, j’ai été orientée en histoire. Cela ne m’intéressait pas, donc je me suis retrouvée sans fac. Pour ne pas rester sans rien faire, j’ai fait une école de théâtre. Et je ne suis jamais retournée à la fac.
[Le métier d’acteur] peut être effrayant pour les parents.
Vos parents vous ont-ils soutenue dans vos choix ?
Oui. J’ai la chance d’avoir des super parents ! Quand j’étais enfant, ils m’ont évidemment dit : «Passe ton bac.» Ensuite, ils se sont inquiétés quand j’ai vécu des périodes difficiles et se demandaient s’il ne fallait pas que je reprenne mes études. Mais ils ont toujours été très présents, très fiers. C’est un métier qui peut être effrayant pour les parents.
Et si votre fils voulait devenir acteur ?
Je me dirais : «Oh non, pourquoi?» (Rires). Mais je ferais comme mes parents : je veux qu’il soit heureux, donc je le soutiendrais.
Vous auriez peur pour lui ?
Oui, parce que c’est un métier difficile psychologiquement. Il a deux parents dans ce milieu, donc le cinéma sera déjà présent dans sa vie. S’il veut être acteur, je le soutiendrai, mais disons que s’il veut faire autre chose, je ne suis pas contre !
Les moments difficiles que vous évoquez étaient liés aux périodes sans travail ou à une mauvaise expérience ?
Non, j’ai eu de la chance, je n’ai jamais eu de tournage compliqué à ce point. C’étaient surtout les périodes où je ne travaillais pas. J’avais une étiquette «télé» et je voulais passer au cinéma, mais les portes restaient fermées. À 20 ans, j’avais mon appartement et il fallait payer les factures, alors j’ai enchaîné les petits boulots, même en jouant déjà dans Clem. Je suis très contente d’avoir eu ces rôles à la télévision, mais j’avais envie d’autre chose. Comme je n’y arrivais pas, je me remettais beaucoup en question.
Aujourd’hui, vous êtes épanouie ?
Oui, je m’estime hyperchanceuse. J’ai travaillé avec des réalisateurs que j’aime, incarné des personnages que j’aime et diversifié un peu les projets. Dans la série Cat’s Eyes (2024), je fais une méchante complètement tarée, je m’éclate. J’aimerais pouvoir passer dans ce genre de registre aussi au cinéma.
Le rôle de vos rêves ?
Un bon thriller ou un film d’action. Je suis un peu casse-cou.
Vous avez tourné plusieurs films avec le père de votre fils, Philippe Lacheau. Un conseil pour concilier couple et travail ?
Poser des limites pour que le boulot n’empiète pas trop sur la vie privée. Mais je ne l’applique pas toujours ! Quand on fait un métier-passion, tout tourne vite autour de ça. C’est important de pouvoir décrocher et revenir aux choses essentielles.
Quand on fait un métier-passion, tout tourne vite autour de ça. C’est important de pouvoir décrocher et revenir aux choses essentielles.
La maternité a-t-elle changé votre rapport au travail ?
J’adore mon métier, mais mon fils sera toujours ma priorité, avant même le plus joli des rôles. Aujourd’hui, si j’ai des périodes où je ne bosse pas, je sais comment me consoler. Le plus beau des rôles, c’est celui de maman. Si je tourne à l’étranger, j’ai du mal à laisser mon fils, donc il vient avec moi. Mais je ne le prends jamais sur le plateau. J’ai la chance d’avoir une maman exceptionnelle qui m’aide beaucoup. Elle vient avec moi pour s’en occuper.
Qu’est-ce qui vous ressource ?
Ma famille. Je passe beaucoup de temps avec ma maman justement et on s’écrit tous les jours. Je n’ai plus de cheval aujourd’hui, mais les balades en forêt me ressourçaient, me faisaient tout oublier. J’ai hésité à en reprendre un, mais quand je tourne je suis peu présente pour m’en occuper.
Votre devise ?
Il faut profiter des gens qu’on aime un maximum.
Une qualité et un défaut ?
Joyeuse… et pas très ponctuelle. Je me suis un peu améliorée, mais j’ai toujours du mal à évaluer par exemple le temps que je vais galérer pour me garer.
Qu’est-ce qui vous met en colère ?
Les automobilistes qui roulent trop lentement, qui klaxonnent pour rien. Ça peut me faire vriller (rires.) J’ai du mal à être très patiente en voiture. Mais ce qui m’énerve vraiment, c’est la méchanceté gratuite et le manque d’empathie.
Une phobie ?
Les grenouilles. C’est ma mère qui m’a transmis sa propre phobie. C’est absurde, mais je ne supporte pas, le côté visqueux, ça saute, ça me dégoûte.
Une personne qui vous inspire ?
Annabel, la fondatrice de Hope. Elle fait partie de ces femmes qui sont de vrais modèles. Elle déborde d’énergie, de force, de courage, de combativité et de bienveillance envers les autres. C’est une femme rare. Une autre femme qui m’inspire beaucoup, c’est bien sûr mon incroyable maman. C’est un modèle de maternité. J’espère créer avec mon enfant un lien aussi fort que celui que j’ai avec elle.